L'adénomyose est une affection gynécologique encore peu connue qui touche environ 20% des femmes. Ce trouble se caractérise par la présence et la prolifération de l'endomètre, la muqueuse qui tapisse l'utérus, dans le myomètre, le muscle utérin. Bien que bénigne, l'adénomyose peut provoquer des symptômes handicapants au quotidien. Explications et focus sur cette pathologie.
Qu'est-ce que l'adénomyose exactement?
L'adénomyose se définit comme une invasion de l'endomètre dans la paroi musculaire de l'utérus, appelée myomètre. Concrètement, le tissu de revêtement interne de l'utérus va croître de manière anormale dans l'épaisseur du muscle utérin.
Cette affection touche généralement la partie centrale de l'utérus, au niveau du fond utérin. Mais elle peut également se développer de manière plus diffuse dans l'organe. L'adénomyose provoque un épaississement des parois de l'utérus qui deviennent plus rigides.
À noter : l'adénomyose ne doit pas être confondue avec le fibrome utérin, également appelé myome. Bien que ces deux pathologies uterine se manifestent par des symptômes similaires, leur origine est différente. Le fibrome se caractérise par le développement de tumeurs bénignes dans l'utérus quand l'adénomyose provient d'une invasion de l'endomètre dans le muscle utérin.
Quelle est la fréquence de l'adénomyose?
- Environ 20% des femmes âgées de plus de 50 ans présenteraient une adénomyose, d'après une étude publiée en 2018 dans la revue Obstetrical & Gynecological Survey.
- Cependant, cette pathologie peut survenir dès l'adolescence. Avant 30 ans, la fréquence est estimée entre 5 et 10%.
- L'adénomyose toucherait préférentiellement les femmes multipares, ayant accouché plusieurs fois.
- Certaines variations ethniques sont observées. Les femmes noires seraient plus sujettes à développer une adénomyose.
L'adénomyose reste une pathologie très sous-diagnostiquée. En effet, dans 50% des cas, elle ne provoque aucun symptôme notable. De plus, ses manifestations cliniques sont proches de celles des fibromes utérins, plus connus. Il est donc probable que la fréquence réelle soit supérieure aux estimations actuelles.
Quelles sont les causes et facteurs de risque?
Les causes exactes de l'adénomyose ne sont pas encore totalement élucidées. Néanmoins, plusieurs facteurs de risque et hypothèses physiopathologiques sont avancés :
Les traumatismes de l'utérus
Des microtraumatismes au niveau de la paroi utérine pourraient favoriser la migration de l'endomètre vers le myomètre. Cela expliquerait la survenue plus fréquente d'adénomyose chez les femmes multipares.
L'adénomyose peut également survenir après des gestes endo-utérins :
- curetage ou biopsie utérine
- hystéroscopie
- pose d'un stérilet
L'inflammation
Une réaction inflammatoire au niveau de l'utérus, par exemple à la suite d'une infection, est susceptible de jouer un rôle dans le développement de l'adénomyose.
Les variations hormonales
Les œstrogènes semblent favoriser l'apparition et l'évolution de l'adénomyose, qui régresse généralement après la ménopause.
Les facteurs génétiques
Des prédispositions génétiques pourraient intervenir dans certains cas.
L'endométriose
Il existerait un lien entre l'adénomyose et l'endométriose, autre maladie gynécologique fréquente. Les patientes atteintes d'endométriose présenteraient un risque accru de développer également une adénomyose.
Quels sont les symptômes de l'adénomyose ?
Dans environ 50% des cas, l'adénomyose évolue sans symptôme notable. Elle est alors découverte fortuitement, lors d'examens pelviens de routine.
Lorsqu'elle est symptomatique, l'adénomyose peut se manifester par :
- Des règles abondantes et douloureuses (ménorragies). C'est le signe le plus fréquent.
- Des saignements utérins anormaux en dehors des règles.
- Des douleurs pelviennes chroniques.
- Une augmentation du volume de l'utérus.
- Du sang dans les urines pendant les règles.
- De la fatigue intense.
- Des troubles digestifs : constipation, ballonnements, nausées.
- Des douleurs lors des rapports sexuels.
- Des difficultés à concevoir liées à l'infertilité.
L'intensité des manifestations est très variable d'une femme à l'autre. Les symptômes ont également tendance à fluctuer avec le temps, alternant périodes d'accalmie et poussées douloureuses.
Les crises sont souvent déclenchées par les règles ou d'autres variations hormonales comme la grossesse. Le stress et la fatigue peuvent aussi jouer un rôle aggravant.
Comment poser le diagnostic d'adénomyose ?
Devant des symptômes évocateurs, le médecin effectue d'abord un examen clinique complet avec toucher pelvien. Il recherche un éventuel épaississement ou une augmentation du volume de l'utérus.
Des examens d'imagerie sont ensuite prescrite pour confirmer le diagnostic et évaluer l'extension de l'adénomyose :
- Échographie pelvienne endovaginale : permet de visualiser un éventuel épaississement localisé ou diffus des parois utérines. Présente une fiabilité de 80%.
- IRM pelvienne : examen de référence, plus précis que l'échographie. Met en évidence avec une grande fiabilité les zones d'infiltration de l'endomètre.
- Hystérosalpingographie : permet d'étudier la cavité utérine en injectant un produit de contraste. Les irrégularités des parois sont visibles.
- Hystéroscopie : visualisation de la cavité utérine à l'aide d'une mini caméra. Permet de repérer des lésions suspectes qui peuvent ensuite être biopsiées.
La confirmation histologique par une biopsie utérine n'est pas systématique. Elle peut être réalisée lors d'une hystérosocpie opératoire ou dans le cadre d'une prise en charge chirurgicale.
Quelles sont les complications de l'adénomyose ?
Bien que bénigne, l'adénomyose peut avoir un retentissement notable sur la qualité de vie en raison de ses symptômes.
Ses principales complications sont :
- L'anémie : due aux saignements menstruels trop abondants.
- L'infertilité : par altération de la cavité utérine et des capacités d'implantation de l'embryon. 20 à 30% des femmes atteintes d'adénomyose seraient infertiles.
- L'endométriose : fréquemment associée à l'adénomyose.
- L'altération de la vie sociale et professionnelle : en raison de douleurs invalidantes.
- La dépression : les troubles psycho-émotionnels sont fréquents.
Quels sont les traitements de l'adénomyose ?
Il n'existe pas de traitement curatif de l'adénomyose. La prise en charge vise à soulager les symptômes et améliorer la qualité de vie. Elle repose sur des mesures médicamenteuses et parfois chirurgicales.
Le traitement médicamenteux
Des antalgiques sont prescrits pour calmer les douleurs pelviennes et les dysménorrhées : paracétamol, anti-inflammatoires (ibuprofène).
Des contraceptifs hormonaux (pilule œstroprogestative) permettent de régulariser le cycle menstruel et de limiter les saignements excessifs.
Le dispositif intra-utérin au lévonorgestrel (Mirena©) aide à réduire les règles abondantes en exerçant un effet local au niveau de l'utérus.
Les progestatifs (Lutényl©, Provames©) pris de façon continue suppriment les règles et améliorent les symptômes.
En cas d'échec des traitements médicamenteux ou lorsque la femme ne désire plus de grossesse, une hystérectomie peut être proposée. Cette ablation chirurgicale de l'utérus permet de traiter définitivement l'adénomyose.
La chirurgie
L'hystérectomie, résection totale ou subtotale de l'utérus, est le traitement chirurgical de référence de l'adénomyose. Elle permet de réséculter les zones malades et d'enlever l'organe en totalité ou partiellement.
Plusieurs techniques d'ablation de l'utérus existent :
- Par laparotomie (incision abdominale) : hystérectomie par voie basse ou par voie haute.
- Par cœlioscopie : hystérectomie vaginale assistée par coelioscopie. Technique mini-invasive privilégiée actuellement.
- Par vagin : hystérectomie vaginale.
Le choix se fait en fonction de l'âge de la patiente, des antécédents chirurgicaux et de l'étendue des lésions. La conservation des ovaires ou non est également discutée au cas par cas.
Une myomectomie, résection chirurgicale des zones d'adénomyose, peut être proposée chez la femme jeune désirant préserver sa fertilité.
Quelles sont les alternatives et médecines douces ?
En complément des traitements classiques, certaines thérapies alternatives peuvent soulager les symptômes de l'adénomyose :
- Phytothérapie : sauge, framboisier, achillée millefeuille.
- Aromathérapie : huiles essentielles de lavande, tea-tree, camomille.
- Ostéopathie : relaxante et anti-inflammatoire.
- Acupuncture : agit contre les douleurs.
- Homéopathie : Pulsatilla, Sepia, Lachesis.
- Huiles végétales : huile d'onagre riche en oméga 6.
- Compléments alimentaires : curcuma, oméga 3, vitamine B6.
Leurs effets restent néanmoins limités et ces méthodes ne constituent pas un traitement à part entière de la maladie. Elles peuvent simplement aider à atténuer certains symptômes.
Quelles sont les évolutions et recherches récentes ?
De nouvelles pistes thérapeutiques font l'objet d'études afin d'améliorer la prise en charge de l'adénomyose :
- Des traitements anti-inflammatoires ciblés pourraient freiner l'évolution de la maladie.
- L'utilisation d'ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU) est à l'étude. Cette technique non invasive détruit les lésions par la chaleur sans nécessiter de chirurgie.
- La thérapie photodynamique : injection d'un produit photosensibilisant activé ensuite par une lumière laser pour détruire les cellules malades.
- Le développement de nouveaux dispositifs intra-utérins thérapeutiques libérant des principes actifs de façon continue dans l'utérus.
Les recherches se poursuivent afin de mieux comprendre la physiopathologie de l'adénomyose et proposer des solutions thérapeutiques innovantes pour soulager durablement les patientes.
Quel suivi et quelle surveillance?
Un suivi gynécologique régulier est nécessaire pour surveiller l'évolution de l'adénomyose et adapter le traitement si besoin.
- Examen clinique annuel avec palpation pelvienne.
- Échographie pelvienne : initialement tous les 6 mois, puis de façon plus espacée.
- Bilan sanguin : numération formule sanguine, ferritine en cas d'anémie.
- Surveillance rapprochée en cas de traitement hormonal.
- En cas de désir de grossesse, suivi pré-conceptionnel spécifique.
Il est important que les patientes n'hésitent pas à consulter leur médecin en cas de modifications des symptômes ou avant d'envisager une grossesse. Une information et un suivi psychologique sont parfois nécessaires pour accompagner les femmes souffrant d'adénomyose.
Conclusion
Pathologie méconnue, l'adénomyose touche probablement beaucoup plus de femmes qu'on ne le pense. Ses causes exactes restent mal comprises et les options thérapeutiques sont encore limitées. Mais les progrès récents en imagerie médicale et les recherches en cours apportent des perspectives encourageantes.
Grâce à un diagnostic précoce, un suivi adapté et une prise en charge personnalisée alliant traitements médicamenteux et mesures complémentaires, il est possible d'améliorer significativement la qualité de vie des patientes atteintes d'adénomyose. Une information claire sur cette maladie est indispensable pour offrir à ces femmes un accompagnement optimal.
Sources
- Adénomyose : quels sont les traitements ? Dr Pierre Panel, gynécologue obstétricien Top Santé.
- Adénomyose : symptômes, causes et traitements. Dr Laurence Dispot. santemagazine 2021.
- Endométriose, adénomyose, kyste : quelles différences ?